Il était une fois...

Toutes les histoires, semble-t-il, commencent par une faille familiale. La mienne ne fut autre que lorsque ma mère décida de laisser derrière nous Alexander, mon cadet, quatre ans de moins que moi, tout juste né. C’est peut-être l’un des plus anciens souvenirs que j’ai, là où lui n’avait que quelques mois. Il serait pourtant fou de dire que je m’y suis opposé ; à quatre ans, on ne comprend pas les choses, et on croit sa mère quand elle vous dit « Ce ne sera pas long, juste quelques temps. » Et puis le silence, l’absence d’explications, le fait de toujours donner des nouvelles choses à faire, cela suffit à combler alors l’énigme de ce qu’on ne perçoit pas alors comme un abandon, car on n’est encore qu’enfant. Et il serait injuste de dire que cela ne m’a jamais importé, pourtant. On ne perd pas son frère ou son père, sans conséquence. On ne se construit pas sur des ruines, sans effets secondaires.

Et pourtant l’enfance se déroula normalement, malgré l’absence d’Alexander et de mon père. J’avais ma mère, j’avais mon beau-père, qui n’avait pas une goutte de son sang dans mes veines, mais me considérait tout de même comme un fils. Assez, en tout cas, pour qu’il manifeste de la joie quand il apprit que j’irais à Poudlard, sorcier que j’étais. Assez, pour éviter mes questions sur Alexander et le fantôme du père biologique. Assez, pour ne me communiquer le décès du géniteur de ma chair, par une simple lettre froide, remplie d’un manque d’émotions qui me parut alors cruel et incompréhensible. Je n’y suis pas allé ; car mon père n’évoquait pour moi que le fantôme du passé, l’absence silencieuse et douloureuse ; rien à quoi j’aurais voulu rendre hommage. J’avais vingt-deux ans, je travaillais autant dans le monde des Moldus que dans le monde des sorciers, en tant qu’historien, je n’avais pas encore rencontré Jamie. Il fallait bien des gens pour accorder l’Histoire dite « normale » et celle des sorciers, des gens pour combler les failles, des gens pour effacer ou manipuler certains évènements historiques, afin que tout se déroule pour le mieux dans le meilleur des mondes, dans le passé comme pour le présent. Et cet univers ne l’était pourtant point, il avait cessé de l’être le jour où ma mère avait abandonné mon frère. Cela, je ne lui ai jamais reproché ouvertement, car nous ne sommes des héros que lorsque nous n’avons plus le choix ; mais mon silence parfois, des regards insistants, l’absence perpétuelle installée à la quatrième chaise de la cuisine, tout cela parlait mieux que je n’aurais su le dire. Il y avait un vide que rien ne comblait, et en moi-même, j’étais pourtant tenu par le respect que je devais à ma mère et son mari, pour ne pas aborder certains sujets, pour ne pas me rebeller ouvertement. C’est facile à faire, quand pendant toute votre enfance, vous avez été éduqué ainsi. C’est l’éducation qui forge tout ; rien n’est plus facile que de croire certaines choses, quand tout votre entourage persiste à le répéter et à le considérer comme fait acquis. Je le sais ; c’est ainsi que l’Histoire, et l’histoire, fonctionnent.

Puis les ruines ont semblé se consolider, soudainement ; pendant huit années. Les huit années où Jamie était là paraissent encore comme un rêve, un fragment détaché du Paradis. Qu’importait qu’elle soit une Lethal Bellus Siren, qu’importaient son pouvoir et sa dangereuse fascination, qu’importait le risque qui ne pouvait qu’aller avec sa nature. Je l’aimais, le plus simplement et le plus profondément du monde, et elle était quelque part idéale, comme toutes ces femmes qui sauvent les hommes. Je l’ai sortie de la rue, j’ai tout mis en œuvre pour réaliser ses rêves de musique, je voulais lui donner la clef du ciel…Et pendant huit années qui passèrent plus vite que je ne l’aurais voulu, car le temps passe vite quand vous êtes face au bonheur, nos projets se construisaient en même temps que notre amour, nous n’étions pas mariés, mais nous savions que cela ne saurait tarder. Tout comme les enfants qui viendrait ensuite, tout comme la vie heureuse qui suivrait. Il n’y a pas de plus grand bonheur que celui qui ne soulève pas de question, s’enfouit dans votre vie en la comblant toute entière, illuminant les moindres recoins, s’immisçant dans chaque parcelle de votre être, ne laissant rien s’approcher pour le détruire et ne laissant pas le passé reprendre le dessus.

Et tout bascula au mois de décembre 2018 – comment avoir la moindre joie à l’hiver qui vient, après cela ? – quand Jamie fut retrouvée morte. Les ruines se renouvelaient, comme pour me narguer d’avoir cru au bonheur, d’avoir cru que le passé ne me rattraperait plus jamais. J’avais eu huit années, j’avais trente ans, et l’heure était venue de payer pour ces fantômes que je n’avais voulu affronter. L’assassinat, ce lâche assassinat qui avait pourtant eu le courage d’être sanglant, était signé des armes de mon père, il ne m’avait fallu qu’une seconde pour le reconnaître ; mais il m’avait fallu des heures pour l’accepter. Il m’avait fallu des jours pour me dire que…mon frère était derrière tout cela. Comment n’aurais-je pu deviner, qu’un jour je payerai pour le bonheur que j’avais eu, qui à lui, n’avait été que malheur ?

Des trois ans, je ne garde qu’un souvenir vague, à peu près aussi lâche que mon cœur à l’époque, de ce cœur qui n’avait pas le cran de se flinguer alors que Jamie et tout le futur qu’elle représentait était partis. Le chagrin et le désespoir me liquéfiaient. Toutefois il fallait croire que l’envie de vengeance pouvait faire tenir des années. Mais quelle vengeance, quand elle est dirigée vers votre frère ? Quelle vengeance peut encore tenir, quand vous vous retrouvez à l’intérieur de la Lincoln Corporation, à moitié endormi par une fumée, quand vous sentez autour de vous ces hosts qui souffrent et qui ne ressortiront jamais vivants de cet endroit maudit ? Le cœur saigne, les mains vous brûlent, les yeux se plissent pour ne pas oublier la vision qu’ils vous donnent, le cœur bat la chamade alors que vous vous dites qu’il est donc enfin temps de payer une dernière fois avant de mourir…La condition humaine vous ordonne de tuer, par défense, par amour envers ceux que vous ne connaissez pas, mais qui ne peuvent pas mourir ainsi. Et puis toute idée de revanche s’arrêta quand je croisai le regard d’Alexander, que je n’avais pas oublié, que je n’aurais pu oublier, comme ces ruines qui ont construit ma vie, mon bonheur et mon malheur.

Et pourtant il m’a épargné ; je l’ai compris quand je me suis retrouvé à nouveau dehors, me réveillant dans une rue, la magie en moi toujours intacte, cette magie que je n’avais jamais cru récupérer et qui m’était finalement revenue, après que j’eusse appris à vivre sans elle.

Je me suis demandé comment mon cœur pouvait encore battre ; comment il pouvait résister à l’image de tous ces fantômes du passé. Mes parents, ma famille, j’avais déjà tout perdu quelque part. Et Jamie ? Et Alexander ? Je me suis demandé comment je ne pouvais pas devenir fou, sachant que le meurtrier de celle qui avait été ma femme était mon propre frère, ce frère absent et disparu, détaché de ma vie depuis des années, et qui m’avait épargné. Et en m’épargnant il m’infligeait la pire souffrance qui soit, celle du doute et de l’indécision. L’amour que je lui portais et que je pensais avoir oublié, battait dans mon être et souhaitait sortir de cette misérable carcasse, souhaitait le retrouver depuis l’instant où j’avais revu son visage. Et Jamie ? Importait-elle moins à ce point ? Aucun camp n’en valait la peine, en choisir un était trahir ou Alexander, ou Jamie. L’errance était le seul choix qui me restait. Seule la bonté et la justice que j’ai toujours eues me servent de guide, pour aider dans l’ombre ceux qui croisent ma route. La solitude et la tristesse sont mon seul masque. Et ma seule haine est envers le destin qui m’a imposé un choix, que je ne pourrai jamais décider.
Peut-être une phrase pour résumer l’histoire de ma vie : Love is a psychopath.

Le caractère ...

Si Alexander était Hyde, et que moi j’étais Jekyll…il n’y a presque aucune meilleure définition de moi-même. J’ai toujours été droit et juste, certes. Ma mère disait sans doute qu’il n’y avait pas garçon plus modèle que moi, mes camarades à Poudlard, pas plus travailleur, dévoué et altruiste. Jamie…me traitait de fou gentiment, en me disant que les gentils ne gagnaient pas toujours ici-bas…Pour elle j’étais un soleil, c’était certain, plus juste et plus généreux que les autres sorciers qu’elle avait croisés, plus tolérant, plus indulgent, aussi. Toute une facette positive, ne fallait-il pas être et vivre en considérant le mal qu’on pouvait faire à autrui et le refuser ? Prêter attention à ses moindres actes en pensant aux conséquences, simplement être. Chacun de mes gestes n’était tourné que vers le bien. Voilà le côté face.

Le côté pile, lui, s’est dévoilé lorsque j’ai découvert que Jamie était morte. Il a levé un voile vers tout ce qui était le chagrin, la déception, la haine, l’indécision. Si l’amour est un psychopathe, c’est parce qu’il vous tourne en Hyde prêt à tout pour ceux que vous aimez. Par amour, on détruit, comme on crée. Par conséquent, je n’aurais pu savoir la haine et la rancune que j’avais toujours eues en moi, soigneusement dissimulées sur la base des ruines de mon enfance. Que ce soit envers mes parents biologiques, qui s’évitaient l’un l’autre, vers mon frère devenu assassin, vers le monde en lui-même, ou envers moi. Tout cela rend faible, et pourtant, je n’ai pas perdu le côté qui me poussait à faire le bien. Je n’étais pas mauvais, j’étais meilleur, je devais être meilleur, et cela rend les gens parfois plus dangereux que même ceux qui tuent. L’éthique diffère tant des gens…Mes ruines ne sont basées que sur tout cela : l’abandon, la colère, l’altruisme, la haine, le désespoir. Voilà comment on s’effrite tout entier, et que l’on considère le champ délabré devenu ma vie, où je suis incapable de décider même s’il faut tout reconstruire avec le pardon et l’amour…ou tout brûler, au nom de la passion morte et de la vengeance.

Sous le capot de la voiture...

• Pseudo/Prénom : Lo
• Âge : 21
• Sexe : Girl
• Où as tu découvert le forum? Mon frère m’a tenté guidé
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• Qu'en pensez-vous? L’idée générale a l’air sympa et c’est intéressant de faire un « futur » possible d’Harry Potter , après avoir fait quelques années sur un autre forum dans cet univers avec des persos étudiants/profs.
  Je ne serais pas active tout de suite, je suis bloquée jusqu'au 3 juillet minmum ^^'
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